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L'éducation et sa place dans ce qui n'est pas encore

Quand le petit humain nait, il ne sait pas grand chose. Beaucoup de choses oui, déjà, d'une façon impressionnante, mais pas grand chose à côté de ce qu'il saura au bout d'un an de vie, rien comparé à vingt ans de vie, et encore rien, rien du tout, après plusieurs décennies. Ce que le petit humain apprend, il ne l'apprend pas à l'abris dans le ventre de sa mère, il l'apprend en contact avec le monde extérieur. L'apprentissage de l'humain se fait donc tout autant parce qu'il est ainsi à l'intérieur mais aussi parce que son environnement extérieur est tel qu'il est. C'est une aspiration de l'extérieur vers l'intérieur, en passant par les sens et par la belle moulinette de son cerveau.

Il faut peu d'observation pour se rendre compte que tout, tout chez le jeune enfant, est un sujet d'apprentissage. Le sourire de sa mère, le goût du lait qu'il boit, le toucher des peaux qui le prennent, le poids des draps, la raideur des vêtements… et puis le froid de l'extérieur, les paroles qui l'entourent, les silences, les lumières des néons, le vent, l'enveloppe liquide de l'eau du bain, le blanc du plafond, les objets qui apparaissent, qui disparaissent, ses mains qui prennent, sa langue qui goûte, le balancement du pas de celui qui le porte… Tout est sujet à interprétation, tout sera classé dans sa tête, et l'adulte ne maîtrise rien. Qui sait ce que l'enfant pense, ce que l'enfant déduit lorsqu'il voit sa mère pleurer ? Qui sait ce que l'enfant comprend lorsque soudain la lumière du jour disparait derrière les volets ?

On pourrait peut-être dire que l'éducation commence dès le premier jour. Quand les parents réclament aux sages-femmes de baisser la lumière de la pièce pour qu'il ne soit pas ébloui, pour que ses yeux ne s'arrachent pas et qu'il puisse se concentrer sur l'odeur de la peau moite qui le porte. C'est peut-être ça : l'éducation commence ici quand les parents privilégient un apprentissage plutôt qu'un autre. La douceur avant la lumière, le goût avant le son. Peut-être même avant encore, quand une femme enceinte décide de traverser la ville à pied, faisant profiter à son enfant tous les sons de l'extérieur…

Tout est enseignant pour le jeune enfant

Je crois que si l'éducation est un sujet aussi sensible, c'est parce que nous le savons plus ou moins pertinemment : chaque geste est une parcelle de l'éducation que l'on offre aux enfants qui nous entourent. Parler de l'éducation, c'est aussi parler de soi. Quand un adulte parle fort et avec fierté devant des enfants, voilà ce que les petits humains peuvent comprendre : « j'ai de l'assurance quand je parle fort », ou « les autres m'écoutent quand je parle fort », ou « parler fort est dérangeant », ou bien même « pour parler fort il faut une avoir une grande bouche ». Il est difficile d'être parent. Nous sommes sans cesse épiés, observés, analysés, imités et tant que l'enfant ne parle pas, difficile de savoir ce qu'il en pense. Et lorsqu'il parle… c'est encore autre chose !

L'éducation est le fait d'élever un enfant vers la vie, de façon à ce qu'il devienne un adulte capable d'y résister et de s'y épanouir. Certains séparent derechef l'éducation et l'instruction. Cette séparation me paraissait toute naturelle tant que j'allais à l'école mais à présent elle me laisse quelque peu perplexe. Comment appelons-nous déjà cette belle institution gratuite, qui apprend (entre autre) à nos enfants à lire et à compter ? L'Education Nationale. Quel est le rôle de l'Education Nationale ? Celui d'instruire ou celui d'éduquer ?

Il me parait que l'instruction est une part importante de l'éducation. Déclarer le contraire signifierait que tout ce qu'on nous instruit, tous ces savoirs scolaires et moins scolaires, n'ont aucun rapport avec la vie. Ils seraient dans ce cas complètement dérisoires. Lire, n'est-ce pas déjà un peu la vie ? Nous savons tous ici, parce que nous lisons, à côté de quoi les personnes qui n'ont pas accès à la lecture passent. Ils ne passent pas à côté de leur vie, non, mais à côté d'un aspect de la vie. L'histoire, les mathématiques, la littérature, les sciences, … c'est tout ça la vie, comme la vie n'est pas que manger, qu'aimer, que se reproduire, que ressentir, ou dire des gros mots. Tous les aspects de la vie sont importants, l'éducation se doit donc d'ouvrir l'enfant au maximum de vie accessible.

L'éveil à l'art et à la beauté… C'est tout relatif !

A trop séparer instruction et éducation on en vient à fournir aux enfants et aux adolescents une instruction complètement déconnectée de leur vie. Quel collégien ou quel lycéen s'est déjà posé la question du sens de son éducation ? Oh, je ne doute pas que les adultes ont déjà une multitude de réponses toutes faites sur la question. Pour réussir dans la vie. Pour avoir un bon emploi. Pour s'éloigner de la précarité. Pour ne pas vivre dans le besoin. Certains diront pour s'ouvrir au monde, pour découvrir la société. Est-ce bien suffisant ? Maintenant que nous sommes adultes, à quoi nous éduquons-nous vraiment ? Tout instruction bien tournée participe à l'éducation de l'enfant. Le reste est une perte de temps.

Comme le calcium se fixe sur les os pour faire grandir le petit humain, son éducation se fixe sur sa personne pour en faire un adulte. L'enfant construit l'adulte. Nous restons toute notre vie un enfant plus ou moins capable de crée l'adulte du lendemain, mais pour l'enfant, il s'agit de son rôle principal. Tout chez lui tend vers cet unique but. Sa facilité pour tout apprendre, tout retenir, son désir de tout imiter. Au fils des années, un tri se crée dans sa tête, la construction se dirige vers des directions privilégiées, choisies ou influencées par l'éducation qu'il a reçue jusque là.

Eduquer les enfants, c'est construire la société future. Mais une société qui ne nous appartiendra plus, elle sera aussi la sienne, à lui l'enfant du passé. Eduquer un enfant, c'est le préparer à vivre et à se construire encore dans ce qui n'est pas déjà, dans le monde qui viendra. Lorsqu'on éduque un enfant, on fait apparaître au grand jour nos espoirs, nos regrets, nos abandons. Lorsque l'on dit : « l'enfant doit bien savoir que ça existe » on dit aussi : « je crois que ça ne changera pas et qu'il sera toujours comme ça quand mon enfant sera grand. » Avez-vous déjà réfléchi aux choses de cette façon ?

Je ne pense pas que l'éducation doit s'arrêter là. Je ne pense pas que l'éducation doit se cantonner à ce que l'adulte du présent sait ou croit, l'éducation devrait s'ouvrir à ce qui n'est pas encore. Instruire un enfant va tout à fait dans ce sens. Par l'instruction, l'enfant découvre un savoir qui appartient sans la moindre hésitation au présent. Un savoir qu'il sera par définition libre de faire évoluer une fois adulte. Apprendre l'orthographe à un enfant, c'est lui apprendre comment l'écriture se fait maintenant, apprendre à un enfant comment cet orthographe et comment les langues ont évolué dans temps, c'est lui faire comprendre que même ce qui est imprimé dans les livres est susceptible de lui appartenir plus tard.

Quand on réfléchit à l'éducation de nos enfants, il me semble pertinent de réfléchir avant tout à ce que nous désirons nous-même apprendre. Etre libre ? Etre heureux ? Vivre sans contrainte ? Avoir une bonne situation ? Nous impliquer socialement ? Faire la paix dans le monde ? Toutes les réponses sont bonnes à prendre, il faut être clair avec soi-même.

Alors, que voulez-vous apprendre, maintenant que vous êtes adulte ? Et dans tout ça, dans tout ce qui vous parait important pour le futur, que voulez-vous apprendre à vos enfants ? Finalement : dans quel mesure, un fois votre programme d'éducation prêt, votre enfant une fois adulte sera susceptible de choisir lui-même ces apprentissages ? Quels seront ses degrés de liberté ?

J'ai souvent quelques réticences lorsque j'observe les éducations que l'on fournit aux jeunes humains autour de moi. Non pas parce que je me permets de critiquer dans le sens où ces éducations que je vois ne correspondent pas à mes idéaux, mais avant tout parce qu'il n'y a jamais eu de réflexion pour l'enfant. Je ne vois que les craintes des adultes, que les contraintes que les adultes subissent, c'est une Croyance du monde présent qui éduque l'enfant.

Parent, sais-tu pourquoi tu tiens ton enfant par la main pour l'aider à marcher ?
Parent, sais-tu pourquoi tu fais prendre des cours particuliers de mathématiques à ton enfant qui a du mal avec les équations ?
Parent, sais-tu pourquoi tu obliges à dire « bonjour » ?

Paradoxalement, se poser la question suffit, il n'y a pas besoin de beaucoup d'intelligence. C'est assez rassurant n'est-ce pas ? Je vais vous dire tout de suite pourquoi. Se poser ces questions et y répondre plus ou moins justement vous détache de vos croyances et de votre vécu présent, parce que vous le verbalisez. Vous prenez de la distance par rapport à lui et vous vous rendez compte que ce que vous pensez absolument vrai vous appartient à vous seul. (Ca marche aussi en Langue des Signes.) Se poser ces questions rend ces automatismes moins naturels qu'ils n'en ont l'air, il libère automatiquement votre enfant.

Je te tiens par la main car je pense qu'ainsi tu apprendras plus vite à marcher. L'enfant est ainsi libre de penser qu'il aurait pu apprendre seul, que vous n'êtes pas indispensable à son développement.  Et vous aussi vous pouvez vous dire ça. Vous me suivez ?

Je te fais prendre des cours de maths car je pense que les maths sont essentielles dans la poursuite de tes études, pour avoir un beau métier. L'enfant est libre de penser qu'il n'est pas nul, même sans savoir faire des équations, seulement que ses études seront peut-être un peu plus difficiles, ou qu'il doit se projeter vers des domaines où les maths ne sont pas essentielles. Ou que de toutes façons, avoir un beau métier ça ne lui parle pas. Ou l'inverse.

Je t'oblige à dire bonjour car il me semble que c'est la base de la politesse et que la politesse est la garante d'une vie en communauté fondée sur le respect. L'enfant est libre de penser qu'il peut respecter une personne sans lui dire bonjour et qu'il a le droit de se méfier des personnes qui ne l'inspirent pas.

Ce ne sont que des exemples de réponses et de réactions possibles des enfants. Très peu d'enfants ont la possibilité de se détacher des croyances de leurs éducateurs tandis que tous les parents (hein, sauf cas pathologique, mais en tout cas tous les parents qui liront ces lignes) sont capables d'amorcer ce genre de réflexion.

Tandis que je n'avais pas conclu mon article sur l'intelligence, car l'intelligence ne se conclut pas n'est-ce pas, je vais prendre le risque de vous poser cette petite question saugrenue :

Ne rêvez vous d'être un bon éducateur pour les enfants dont vous avez la charge ? Et cela avant tout ?

Vous ne saurez jamais si vous avez réussi, si cet enfant est devenu aussi bien qu'il aurait dû l'être, mais vous même vous pouvez toujours vous regarder. Qu'ai-je éduqué à l'enfant ? Mes croyances, mes peurs, ou… son propre désir de vie ? Celui-là même qui l'a fait naître au monde, qui lui a fait ouvrir ses sens pour que l'extérieur entre en lui et le forme à devenir adulte pour des instants futurs.

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Céline.

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Pas facile, ce thème, vu le temps…

J'ai dû replonger dans de vieux souvenirs, de quand on partageait tous les deux les mêmes temps de folie et de créativité. Ah ! Vivement qu'on se remette ensemble. Pour être un peu mieux comme nous sommes différents.

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La théorie de l'intelligence

Ma vie s'est tournée de telle façon que j'ai dû sérieusement me pencher sur la notion de l'intelligence humaine. Qu'est-ce que c'est ? En quoi interfère-t-elle avec nos sensations ? Notre personnalité ? Notre relation avec l'autre ? J'ai un peu lu, des choses auxquelles je n'adhérais vraiment pas et d'autres qui m'ont bien inspirée. J'ai discuté de cette question autour de moi. Avec délicatesse, oui, l'intelligence figurez-vous que c'est tabou. On ne veut pas qu'elle soit mesurer, expliquer, discuter… L'intelligence touche profondément les êtres, les met face à des questions qu'ils préféreraient éviter, face à des fantasmes plus ou moins inavouables. Petit à petit, je me suis formée ce que j'appelle en mon intérieur « La Théorie de l'Intelligence ».

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Attendre

Ce matin, un élève devait me rendre visite pour une leçon de physique. Sur la cinétique en mécanique justement. Les trajectoires, les vitesses… J'appréhendais sa visite, comme j'appréhende la visite de tout nouveau jeune avant de parfaitement le connaître. Est-ce que je vais savoir l'aider ? Est-ce que je vais le comprendre ? Répondre à ses questions ? Trouver ce qui l'empêche de savoir répondre ? Cet élève a de plus la particularité d'être infirme. Sa scolarité m'a l'air chaotique, je ne lui ai rien demandé mais cela me parait flagrant lorsque je réfléchie à ses difficultés. Je ne sais pas combien son handicap joue dans ses difficultés scolaires alors je reste un peu en retrait avec lui, de façon à ce que tout se révèle et que je sache sur quelle base m'appuyer.

Donc, j'attendais sa venue et j'appréhendais et j'avais hâte de me mettre au travail. J'attendais et je faisais ma leçon d'anglais. En même temps j'apprends le nom des animaux de la mer à la petite loutre qui regarde Ωcean. En même temps je programmais mon après-midi. C'est curieux comme parfois je sais si bien attendre, si bien que lorsque cet élève m'a appelée pour me dire que son grand-père avait un problème et qu'il ne pouvait pas l'emmener je savais très fortement que ça ne faisait rien.

La salle était prête, mon cours l'attendait, si le printemps était vraiment là j'aurais mis une fleur dans un bol d'eau. Je pensais à cet élève, je savais par quoi j'allais commencer, j'avais tout préparé, j'avais peut-être toutes les raisons d'être fâchée et pourtant, lorsqu'il m'a dit au dernier moment qu'il ne pourrait pas venir, je lui ai dit que ce n'était pas grave. Il était facile d'accepter ses excuses parce que vraiment je n'étais pas lésée.

Et alors j'ai repensé à la fois où j'attendais la visite de mon amie, qu'elle n'est pas venue et combien je me suis écroulée cette fois-là. J'ai repensé à toutes les années où j'attendais autant de mes parents qu'ils en attendaient de moi. J'ai repensé aux mois durant lesquels j'attendais le retour de l'Explorateur de son travail, blessée par la moindre minute de retard. J'ai repensé à ma scolarité, où j'attendais le moment où ça allait se compliquer et où tout est resté si facile.

Et il y a ces attentes joyeuses. Celle de ma vieillesse. Celle de la rénovation d'Otto. Celle de la naissance de l'adorable.

Dès que je vois l'image d'une baleine ou que je l'entends chanter,
mon coeur bat la chamade.

(Excusez-moi, c'est le passage des espèces disparues, je vais faire un câlin à la loutre…)

Il y a des choses que je sais attendre, d'autres que je n'ai pas su mais que j'ai apprises et je crois qu'aujourd'hui il me reste très peu d'attentes douloureuses. Par exemple : j'attends de vendre mon livre, certes, mais je sais que même si cette attente n'aboutie pas, je ne serai pas malheureuse. J'attends aussi qu'un éditeur me fasse signe, mais tous mes projets ne s'arrêtent pas là. Je crois que c'est ça le secret d'une attente réussie. C'est une attente joyeuse, une attente dont l'issue n'est qu'une branche de l'avenir.

Alors quand j'attends de chaque jour qu'il me laisse une petite loutre et un explorateur en vie, pour continuer le lendemain à vivre le monde avec eux, je me dis qu'ici cela pourrait être une souffrance sans nom qui me guette. On m'a souvent dit qu'il ne fallait pas y penser, en fait qu'il ne faut pas tenter de travailler sur cette attente . J'y ai longtemps cru mais aujourd'hui je me dis qu'il pourrait en être autrement. Aujourd'hui j'aimerais vraiment me détacher de toutes mes attentes douloureuses, vraiment toutes.

A chaque attente, il y a la possibilité qu'elle ne se concrétise pas. Alors notre corps et notre esprit s'engagent sur la course d'un temps qu'on espérait pas. Un temps qu'on ne reconnait pas. Comme s'il y avait eu une erreur, comme si ce n'était pas ce qui devait être. Un temps qu'on voudrait réfuter. Un temps qu'on regrette. Un temps qu'on rejette. Et pourtant nous y sommes, à voguer une seconde pour une seconde, continuellement comme si de rien n'était, et l'autre monde, celui qu'on attendait, s'éloignant toujours plus.

Je crois que la meilleure chose à faire et de profiter pleinement du monde avant qu'il n'y ait l'aiguillage. Et puis comprendre avant que cela ne survienne que chaque avenir est tout aussi réaliste que les autres. Et que le temps avance encore aussi vite après la bifurcation. Voilà, c'est fini. Tu as fermé les yeux pendant le virage, mais à présent il n'est plus. Il est derrière toi. Il a disparu. Regarde devant toi. Regarde devant par pitié ! Tu fonces tout droit dans l'arbre des possibles !!! … Aaah !! …

Je n'ai pas lu 1Q84 jusqu'au bout. Tout du long de ma lecture du tome 1 et 2 je n'ai pas cessé de me demander : est-ce que je lis du vent ou est-ce que ce livre est génial ? Et puis une à une les intrigues se sont dénouées. J'ai vu qu'il me restait encore un bon paquet de pages avant la fin et j'ai tablé sur « ce livre est nul ». Donc, je n'ai pas terminé ma lecture et je ne la terminerai pas. Ceci dit, dans 1Q84 il y a une idée intéressante : celle de la venue d'un monde qui ne devrait pas. Il ne devrait pas car il est illogique qu'un monde change à propos de son passé et pourtant il est, il faut donc le vivre. Je pense que c'est la seule chose que nous avons à faire lorsqu'un monde qu'on n'attendait pas survient.

Ainsi, je ne pense pas faire la moindre infidélité à ce que j'aime, à ceux que j'aime, en disant : si mon livre ne se vend pas bien, s'il n'est pas édité par une maison d'édition qui a pignon sur rue, et bien je vivrais quand même. Si notre épopée avec Otto se passe mal, je vivrais quand même. S'ils disparaissent, je vivrais quand même. Mais en attendant tout ça, je profite de ces belles attentes.

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Objet


Il y a les objets du quotidien,
les compléments d'objet,
l'objet du délit,
les obje(c)t(ifs),
les premiers jets de l'aube,
et les objets sans objet :
comme cette petite dame.

N'est-ce pas curieux ?

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La tropopause n'est pas loin

Je ne savais s'il fallait en parler ou non, de tout ce qui me fait vraiment peur. Je ne parle pas ici de mes peurs personnelles, mais des peurs que je projette sur chacun de vous. De mes vraies peurs.

De la Corée du Nord qui devient complètement folle,
Des centrales nucléaires vieillissantes un peu partout en Europe,
De ces déchets radioactifs,
De la pollution de l'air,
Des phytoplanctons en voie de disparition,
Et puis des saumons aussi parce que je les vois tous les jours dans les barquettes plastiques,
Des pays dévastés par la guerre, des migrants qui sont refoulés à toutes les frontières,
Des enfants qui vivent dans l'insécurité profonde,

Et je me demande alors comment j'ai pu. Comment j'ai pu naître ici, donner naissance à ma petite loutre, et avoir encore de l'espoir jusqu'à aujourd'hui.

C'est l'anniversaire de Dmitri Mendeleïev. Le tableau périodique des éléments est la preuve selon moi que le monde est magique et qu'il résonne. Que cette chose que j'habite, dans laquelle je vis, mon corps, l'extérieur, le vent, les montagnes, les étoiles, l'atmosphère, tout ça est magnifique. Incroyable. Comme les notes harmoniques d'un instrument immense de beauté, de savoir et de hasard.

La preuve selon moi qu'on a faux, complètement faux de ne pas s'ouvrir plus grand la tête. J'aimerais ne plus avoir si peur, non parce que tout cela me gâche sa beauté, mais pour ne plus avoir honte. Honte de moi, de laisser les choses s'enlaidir ainsi. Pas que je pense qu'à une échelle géologique tout cela soit grave mais parce que ne pas s'en préoccuper est selon moi faire affront à la vérité, on passe à côté de quelque chose.

Comment accepter que tout cela survienne ?

Je pourrais être tout à fait pure, je serai tout de même touchée. Oui, je respirerais cet air cancérigène encore, personne ne peut y échapper, mais surtout je ne pourrais jamais monter plus haut dans l'humanité. Personne ne pourra jamais monter plus haut. Parce que toutes ces choses qui me font littéralement flipper, et il y en a d'autres !, nous retiennent gravement dans une misère sans nom. Tous. Brahman y compris.

Alors vous vous dites, et avec raison, qu'il faut vivre encore et s'aimer. Aller en terrasse peut-être ? Ah ah ! La bonne blague ! Ca ne changera rien, rien rien à cette peur à cette souffrance que je porte en moi et que vous portez très probablement en vous aussi. Je ne peux pas imaginer qu'il peut en être autrement. Parce que vous êtes contraints de ne pas grandir. De ne pas toucher plus de beauté. Plus de pureté. Plus de vérité. Parce qu'aujourd'hui ce qui nous retient le plus loin de la sagesse c'est cette laideur partout, qu'on voit même lorsqu'on ne s'informe pas. Et je ne m'informe pas. Et pourtant je sais, sans jamais vérifier mes sources, que je suis retenue.


Vous voyez ma colère ? Vous voyez ma souffrance ? Vous voyez ma peur ?

Je suis en train de gâcher ma vie, mon espoir, ceux de ma fille, les vôtres. Parce que le monde est homo-effrayant.

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Ecrire à la main


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Bleu


« C’est quand même bizarre comme thème, tu ne crois pas ?
— Tu as une idée ?
— Oui, je vais prendre en photo une orange.
— Mais ce n’est pas bleu !
— Tu as raison, ils ne vont pas comprendre.
— Tu n’as qu’à écrire “bleu” dessus.
— Excellente idée ! Tu es vraiment génial comme amoureux ! »

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