Je ne savais s'il fallait en parler ou non, de tout ce qui me fait vraiment peur. Je ne parle pas ici de mes peurs personnelles, mais des peurs que je projette sur chacun de vous. De mes vraies peurs.
De la Corée du Nord qui devient complètement folle,
Des centrales nucléaires vieillissantes un peu partout en Europe,
De ces déchets radioactifs,
De la pollution de l'air,
Des phytoplanctons en voie de disparition,
Et puis des saumons aussi parce que je les vois tous les jours dans les barquettes plastiques,
Des pays dévastés par la guerre, des migrants qui sont refoulés à toutes les frontières,
Des enfants qui vivent dans l'insécurité profonde,
…
Et je me demande alors comment j'ai pu. Comment j'ai pu naître ici, donner naissance à ma petite loutre, et avoir encore de l'espoir jusqu'à aujourd'hui.
C'est l'anniversaire de Dmitri Mendeleïev. Le tableau périodique des éléments est la preuve selon moi que le monde est magique et qu'il résonne. Que cette chose que j'habite, dans laquelle je vis, mon corps, l'extérieur, le vent, les montagnes, les étoiles, l'atmosphère, tout ça est magnifique. Incroyable. Comme les notes harmoniques d'un instrument immense de beauté, de savoir et de hasard.
La preuve selon moi qu'on a faux, complètement faux de ne pas s'ouvrir plus grand la tête. J'aimerais ne plus avoir si peur, non parce que tout cela me gâche sa beauté, mais pour ne plus avoir honte. Honte de moi, de laisser les choses s'enlaidir ainsi. Pas que je pense qu'à une échelle géologique tout cela soit grave mais parce que ne pas s'en préoccuper est selon moi faire affront à la vérité, on passe à côté de quelque chose.
Comment accepter que tout cela survienne ?
Je pourrais être tout à fait pure, je serai tout de même touchée. Oui, je respirerais cet air cancérigène encore, personne ne peut y échapper, mais surtout je ne pourrais jamais monter plus haut dans l'humanité. Personne ne pourra jamais monter plus haut. Parce que toutes ces choses qui me font littéralement flipper, et il y en a d'autres !, nous retiennent gravement dans une misère sans nom. Tous. Brahman y compris.
Alors vous vous dites, et avec raison, qu'il faut vivre encore et s'aimer. Aller en terrasse peut-être ? Ah ah ! La bonne blague ! Ca ne changera rien, rien rien à cette peur à cette souffrance que je porte en moi et que vous portez très probablement en vous aussi. Je ne peux pas imaginer qu'il peut en être autrement. Parce que vous êtes contraints de ne pas grandir. De ne pas toucher plus de beauté. Plus de pureté. Plus de vérité. Parce qu'aujourd'hui ce qui nous retient le plus loin de la sagesse c'est cette laideur partout, qu'on voit même lorsqu'on ne s'informe pas. Et je ne m'informe pas. Et pourtant je sais, sans jamais vérifier mes sources, que je suis retenue.
Vous voyez ma colère ? Vous voyez ma souffrance ? Vous voyez ma peur ?
Je suis en train de gâcher ma vie, mon espoir, ceux de ma fille, les vôtres. Parce que le monde est homo-effrayant.
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A bientôt !
Céline.