J’ai lu il y a quelques jours l’article de Line à propos de la douance adulte. Je partage entièrement son besoin. La douance est un sujet que je commence à bien connaître il me semble. J’ai lu, beaucoup (énormément, au point d’en écoeurer mon compagnon… enfin, j’ai lu) sur le sujet. Des articles de presse, des livres de psychologues et d'autres, des vecteurs d’idées reçues, de fantasmes, des informations précieuses, des explications à ne pas manquer. J’ai fait lire aussi. J’ai discuté. Dialogué longuement. Et malgré tout, j’ai toujours ce besoin intense de rencontres, de partages, de confrontation presque. La douance, je voudrais à la fois la crier dans la rue et l’oublier. Et oui, je regrette que les adultes doués ne parlent pas davantage. Je voudrais entendre les adultes doués ordinaires.
J’ai déjà écris quelques articles qui traitaient de points qui me paraissaient en lien direct avec la douance et pourtant, j’ai beaucoup hésité avant d’utiliser le label « vivre douée » sur ces articles, ne sachant par toujours de façon pertinente ce qui appartient à la douance de ce qui appartient simplement à moi-même en tant qu’être humain de l’espèce humaine.
Parler de la douance des enfants, c’est facile. L’enfant ne parle pas de lui-même, c’est l’adulte toujours qui le décrit. L’enfant, s’objective facilement, l’adulte beaucoup moins. Cette part de subjectivité me dérange toujours beaucoup. Qui saurait partager chacun de mes mots entre ceux qui appartiennent à la douance et ceux qui sont plus communs ? Sans vouloir décrédibiliser une quelconque différence entre ceux qu’on reconnait comme HPI et les autres (ce serait hypocrite), je pense qu’il ne faut pas oublier que cette différence est intérieure. Ce n’est pas seulement qu’elle ne se voit pas, c’est surtout qu’elle est entièrement incarnée dans l’individu. La façon de penser, de percevoir le monde, de sentir et de bouger, la différence est là dans toute son intensité — et en même temps elle est ridicule. Vivre pompier. Vivre pianiste. Est-ce que chacun de leur geste ou de leur pensée sont-ils si différents que cela ? Lesquels méritent-ils d’être dits en tant que pompier ou pianiste ? N’appartiennent-ils pas simplement à celui qui les dicte, seulement pour sa part d’individu ? Et n’y a-t-il pas tant de vies de pianistes différentes qu’il y a de différences entre un pianiste et un pompier ?
Je crois avoir compris que la douance est avant tout une différence microscopique. Elle est dans mes cellules nerveuse. Une histoire de myéline. Alors, ce qui en ressort finalement, ce que je peux en dire une fois vécue… ? Ce que j’aurais le droit d’en dire. Ce n’est pas seulement une histoire de mesure de QI, je veux avant tout parler ici du vécu. Ma légitimité est bien douteuse.
Ce manque de légitimité je le ressens à nombre de mes lectures. Lorsqu’on les décrit, lorsque je lis les questions qu’on pose « aux surdoués » : est-ce que vous avez… est-ce que vous ressentez ça ou ça… ? ; je ne sais pas très bien si je n’ai rien compris à la vie ou si ma conscience m’a déjà menée bien loin-loin du commun des mortels. Je suis en contact avec des généralités qui, de façon bien certaine, ne m’appartiennent pas. Je crains de produire le même malaise en m’exprimant sur le sujet.
Et malgré tout, je partage de regret de Lise. Comment se construire sans exemple ?
J’ai appris il y a quelques mois à peine, au hasard de mes lectures, que le terme de surdoué (et les autres appellation) existait. Il m’avait échappé pendant des années par un curieux hasard, des circonstances presque douteuses. Alors, je ne le cache pas, depuis que je l’ai découvert, depuis que j’ose en parler autour de moi à mes amis — qui, de façon tout aussi curieuse, connaissent ce mot de façon très personnelle — j’ai l’impression de me redécouvrir. Oui, parfois ce qu’ils me disent ne n’appartient pas, parfois ce que j’exprime ne leur parle pas, et je me dis que ce qui semble être à la douance ne l’est pas finalement, mais ces exemples m’enrichissent à un tel point que je regrette parfois de ne pas l’avoir su plus tôt.
Finalement, douance ou pas vraiment douance, le partage est la clef, n’est-il pas ? Cet article m’est venu en tête (bien mieux qu’écrit ici, je le regrette) en lisant Nietzsche et je me suis alors demandée si cette anecdote pouvait être intéressante. Lorsque je lis je pense beaucoup, comme si je marchais en solitaire. Mes yeux se déroulent sur les lignes, mes pensées les entendent mais n’en font qu’à leur tête. Elles travaillent de leur côté, seulement rythmée par la musique du livre que je lis. Autant vous dire, que du livre je ne retiens pas beaucoup… Enfin, moi j’ai l’impression de tout en savoir, comme si je l’avais lu avec mon être le plus profond. Je pense comprendre parfaitement Nietzsche mais je serai incapable de vous citer le moindre passage (hors relecture). Je rédigeais mentalement cet article en lisant ce livre de la bibliothèque et je me suis alors soudainement bien rappelée que la douance était avant tout une question d’intensité.
La douance ne se discute pas finalement, elle ne s’échange pas non plus, elle s’évoque.
« Dans tout ce qu’on élude et tout ce qu’on nie, on trahit un manque de fécondité : au fond, si nous étions de la bonne terre, nous devrions ne rien laisser perdre sans l’utiliser, et voir en toute chose, tout événement, tout homme, un engrais, une pluie, un rayon de soleil bienvenus. »
Opinions et sentences mêlées, Nietzsche.
Alors, n’hésitez pas. Moi je vous écoute avec grand intérêt.
Bonjour,
RépondreSupprimerJe découvre votre blog via le Blog de Line - Je vais dévorer les autres pages
Merci de ce partage éclairant.
Damien
Bonjour Damien, merci pour votre message ! J'avais peur que cet article soit de nouveau trop superficiel. Je ne me défais pas du sentiment d'incompréhension, même lorsque j'écris.
SupprimerBonne continuation Damien et à bientôt j'espère !
Céline.
aaaah les zèbres !!! <3
RépondreSupprimerBonjour Mouss. As-tu aimé cet article ?
Supprimer