Il y a bien un moment où j'en ai plus que marre d'entendre l'Explorateur demander pourquoi je n'ai pas encore envoyé mon manuscrit aux éditeurs. Il a beau y aller avec des pincettes, moi, même les pincettes les plus douces me font mal. C'est le pourquoi. Le pourquoi, non mais quelle question ?! Et elle n'est même pas de moi !
Pourquoi mettre autant de temps pour faire quelque chose de si facile ? De si simple, en fait. J'ai déjà la liste des éditeurs visés. J'ai déjà la lettre de présentation. J'ai déjà le papier, les enveloppes, … ! Alors pourquoi se poser encore des questions ? Pourquoi essayer de répondre à pourquoi, la question qu'on me pose en fait, tandis que tout ce qu'il veut me dire lui c'est “fais-le”. Sauf que voilà, moi quand on me demande pourquoi, je veux répondre à pourquoi. Je me dis que c'est une question intéressante. Je l'ajoute sur la liste des choses à faire avant de finaliser la chose. Avant d'acheter les cartouches noires et les reliures.
Mais aujourd'hui c'est un jour spécial. Le jour où l'Explorateur a recommencé à travailler. Depuis plus de deux semaines qu'il était en vacances, on dit que tous les atomes du corps se renouvellent en 15 ans, moi je n'y crois pas à ce chiffre : deux semaines c'était bien assez à mes atomes pour changer et oublier ce que ça faisait de ne plus avoir d'Explorateur à la maison. Mais un trou dans une planche me l'a bien rappelé. Le trou dans les belles planches que j'avais peintes au rouleau. Je me dis, je lui dis : ce n'est rien, le trou ne se rebouche pas ; mais le souvenir, si. Bientôt, on ne le verra plus. On le remplacera par un auto-collant. Sauf que quand je parle, je dis éto-collant et je n'arrive pas à retirer cette faute de mon langage.
La belle fougère de l'Explorateur. |
Alors j'ai commandé les cartouches noires. J'ai oublié pourquoi. Et j'ai payé avec la carte du compte commun. Celle dont l'argent ne vient pas de mon travail.
J'ai l'amitié excessive. J'ai l'impression d'avoir des lianes ici et là qui n'en finissent pas de souffrir à force de trop vouloir serrer. Elles touchent, elles frémissent de plaisir, elles attendent et n'en peuvent plus de transpirer. Deux e-mails là où un bon aurait dû souffrir, mais qui n'est pas venu, trop désireuse de sortir de moi-même que j'étais. Des invitations, encore et encore, de la jalousie quand parfois d'autres savent rendre le service dont je suis incapable. De la jalousie, non pas vraiment. Un autre mot, mais un mot que je ne connais pas. De la jalousie, je crois que c'est contre quelqu'un ou un groupe. Moi c'est comme de la jalousie mais contre moi-même. Contre ce que je suis incapable de réaliser pour que mes lianes caressent et que la sève coule avec bonté chez l'un ou chez l'autre.
On m'assure que ça marche, qu'en fait je fais tout bien comme il faut et qu'on ne me demande pas plus. Mais je suis insatisfaite. Insatisfaite de ce que je donne. Et quand on donne mal, c'est irrémédiable, on reçoit mal. Je souffre d'avance de ne pas y arriver. A avoir l'amitié paisible. Et pourtant, c'est vrai, je suis gentille. Amoureuse de chacun. Loyale. Rayonnante. Ce n'est pourtant pas le problème. Je ne voudrais pas qu'on souffre de savoir ma souffrance.
Je ne sais pas encore si la baleine chante dans l'espoir d'être entendue ou dans le but d'être comprise. Il y a exister, et aussi exister comment pour les autres. Et encore pourquoi.
Mais je pourrais oublier tout ça. Vivre quand même. Vivre malgré tout. Et malgré tout être heureuse. Si seulement je n'avais pas un instinct fou qui me disait que c'était quand même possible. D'atteindre cette plénitude, plus belle et plus grande encore que celle déjà atteinte.
C'est qu'on a fait un trou dans “mon” panneau si parfait. Ca m'a rappelé que même si je rendais le monde entier heureux, il faudrait encore ouvrir la boîte de pandore.
Mais qui êtes-vous donc ? Pour voir.
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Céline.